Oussema Troudi vient de reprocher à Cheima Zaafouri d’user de plagiat dans l’article qu’elle a consacré à l’exposition du collègue Sami Ben Ameur, en invitant la jeune plasticienne à faire preuve de plus de décence, eu égard de l’importance de l’objet de sa critique, s’agissant en fait de l’exposition de l’actuel Directeur du Musée d’Art Moderne et Contemporain qui vient d’être inauguré par Le Président de la République. Je ne connais pas personnellement Cheima Zaafouri, elle fait partie des nouvelles générations formées à l’Ecole des Beaux-Arts de Sfax, pour lesquelles j’ai éprouvé un interêt particulier, durant les vingt dernières années, du fait que j’ai été durant quatre ans, le premier directeur fondateur de cette honorable institution. Durant les dernières années, et à travers Facebook, j’avais remarqué le travail de cette jeune plasticienne que j’ai trouvé digne d’interêt et je n’avais pas manqué de le signifier en partageant à plusieurs reprises sur mon profil des photos de ses oeuvres. J’ai constaté par la suite que mon interêt était justifié et que sa production a été primée lors d’une manifestation internationale, tenue à Ouagadougou.
Qu’une jeune plasticienne qui promet se mette à user de plagiat pour écrire un texte on ne peut plus formaliste et laudatif à souhait doit donner à réfléchir sur les raisons de ce parti pris pour une oeuvre que je considère à titre personnel, beaucoup moins intéressante que la sienne propre.
Mais mon propos est ailleurs. Pour moi le symptôme n’est pas la maladie. On ne peut expliquer ce comportement contradictoire, en convoquant la liberté d’expression et en rappelant que « des goûts des couleurs on ne discute pas ». D’autant plus qu’il s’agit d’une jeune doctorante qui n’a pas interêt à se faire une réputation de plagiaire et de productrice de textes mystificateurs, tel celui qu’elle vient de publier. Même si l’on a Sami Ben Ameur, comme directeur de thèse.
De quelle maladie ce comportement est-il le symptôme? Car Chaima Zaafouri n’est pas la seule à considérer que discourir sur l’art est un simple exercice de « montage de mots » qui fait semblant de passer pour un exercice de penser, qui ne tire sa légitimité que du « flou artistique » propre à la critique d’art peu universitaire, parce que assimilé à des arguments de vente, propre au marché de l’art spécialisé dans la promotion des chromos, tel que décrit, depuis près d’un demi siècle par Raymonde Moulin. Ce dont il s’agit en toute vraisemblance, c’est d’un virus corrupteur qui ne cesse, depuis au moins une vingtaine d’année, de nuire à la productivité de nos institutions d’Enseignement Supérieur, spécialisées dans les Beaux-Arts.
Ce virus s’appelle économisme primaire et aliénant, qui soumet toute activité symbolique à la rentabilité économique et que ce souci phagocyte et transforme en décor de façade, lieu de consommation ostentatoire.
Mais l’économisme rampant n’est pas l’économie dont l’approche scientifique saine est on ne peut plus souhaitable pour sortir la création artistique de la mystification programmée dont elle est l’objet de la part des mystificateurs professionnels, propagateurs d’intégrisme économique , soutien discret mais réel de l’intégrisme religieux. Et ce n’est pas avec ces mystificateurs, corrupteurs de culture et d’université que l’on va combattre le terrorisme. Il y a de ces compromis qui ne sont en fait que des compromissions. Il va falloir distinguer l’essentiel de l’important. Il est important de trouver les moyens financiers de rendre viable ce grand complexe culturel, qu’est la Cité de la Culture. Mais il n’est pas question de sacrifier la finalité culturelle et pourquoi pas révolutionnaire de l’activité culturelle, à vocation symbolique, aux désiratas des adeptes de l’hégémonisme économiste, comprometteur d’avenir. Car la Culture est l’essentiel . Elle est la profondeur stratégique et du politique et de l’économique.
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